visites

السبت، 13 فبراير 2010

Conception spatiale « à priori » en 2D (deux dimensions)

o   
Dans une surface géométrique élémentaire et régulière (un carré) concevoir et aménager une placette.
L’étudiant est libre de jouer— dans la conception—avec des différences de niveaux minimes.

Exemple : Une assiette —un lot de terrain— qui a la forme d’un carré dont le côté mesure 10 mètres.
1. Exemple d’une conception (composition) en 2D 2.Traduction de la composition (2D) en volume (3D)

Test de connaissance basique

. Quelle est selon vous la meilleure proposition (façade) du point de vue… ??


Le dernier volet de ce test concerne la disposition interne des espaces proposés. En effet quel est la meilleure disposition ??
D’après des illustrations parues dans l’ouvrage de : J.L. Moia, "Como se proyecta una vivienda", GG ediciones, Barcelone 1968.

Vous pouvez enrichir le débat par vos réflexions en répondant à cet article.

Art minimal et mouvement moderne

 
Présentation : C’est surtout dans le domaine des arts visuels que se distingue une relation fondamentale entre l’art minimal et certaines tendances de son prédécesseur : le mouvement moderne. Cet article a pour but de clarifier les aspects de continuité ou de ressemblance ainsi que les principes sur lesquels reposent leurs créations.
Extrait :« Culte de la machine, fonctionnalisme contre expressionnisme, linguistique structuraliste, coupure avec le passé proche, autant de caractéristiques en commun avec le mouvement moderne dont les artistes minimalistes connaissent bien les enjeux. »
En 1965 le philosophe et critique d’art R. Wollheim emploie pour la première fois le terme de minimal art dans la revue Arts magazine pour qualifier le travail de M. Duchamp. Ce terme sera réemployé par la suite pour désigner l’activité dans les années 60 des artistes comme Carl Andre, Dan Flavin, Donald Judd, Sol Lewitt, Frank Stella, Robert Morris ou Dan Graham. La même année, F. Stella provoque un scandale à l’exposition du musée d’Art Moderne de New York en exposant ses Black paintings, une série d’interventions très réduites. Le mouvement se pose en réaction contre la prééminence du Abstract expressionism dont un des représentants, Jackson Pollock, mettait l’emphase sur la spontanéité et l’intuition du gestuel.
Le minimal art ou ABC art est un de ces mouvements d’après guerre qui a eu une énorme influence sur les autres domaines de la création comme le design, l’architecture mais aussi la musique et la littérature. Il suffit de comparer les Modular repetitions du compositeur T. Rickley et les Serial forms de F. Stella ou D. Judd pour saisir leur intérêt commun pour le rythme répétitif avec le minimum de variations.
C’est surtout dans le domaine des arts visuels que se distingue une relation fondamentale entre l’art minimal et certaines tendances de son prédécesseur : le mouvement moderne. Cet article a pour but de clarifier les aspects de continuité ou de ressemblance ainsi que les principes sur lesquels reposent leurs créations.
JPG - 59.6 ko
Vitrail de l’abbaye de Fontenay. Semblable désir d’épuration chez les cisterciens et les minimalistes.
Le minimalisme prône des formes géométriques simples (primary structures) épurées jusqu’à la disparition de toute expression. Les matériaux sont du registre de l’impersonnel et sont puisés dans les produits industriels ou manufacturés. Les assemblages se font de manière sérielle en réduisant les éléments de jonction ou en les supprimant. Les matières gardent leur propre couleur ou dans le cas du hard edge elles dominent la forme pour lui enlever tout effet de profondeur ou de volumétrie.
Dans cette tentative de ne pas représenter ou symboliser toute expression de l’image ou de la forme, la machine apparaît comme l’outil idéal de production. Sans esprit, son fonctionnement mécanique est dénué de tout sentiment. Elle est capable de fabriquer une même pièce en très grand nombre avec une précision qui empêche de distinguer l’une de l’autre. L’original ne peut pas exister, dissolu dans le processus de réplicabilité [1]. Cette façon de réutiliser la banalité ou la neutralité de l’objet est aussi employée au même moment dans le pop art qui partage ce goût de l’impersonnel créé par les techniques industrielles. C’est surtout dans la société de consommation et l’imaginaire quotidien que A. Warhol, R. Lichtenstein, J. Johns et d’autres artistes puisent leur inspiration et exploitent le pouvoir de l’image de la culture populaire. Ces deux mouvements se confrontent aussi aux questions des espaces et du territoire mais de manière très différente. Paysages urbains ou interventions soulèvent les questions d’emboîtement des échelles pour mettre en évidence les mutations des milieux urbains ou naturels.
Ce qui caractérise surtout le minimal art, c’est la façon dont le support devient significatif. Il est autoréférentiel car il ne renvoie qu’à lui même et amène à se questionner non pas sur un sujet, un signifié, mais le signifiant. L’œuvre comme signe est remise en cause dans le déplacement de sa relation entre le concept et l’empreinte psychique [2] dans ce cas visuelle. Elle peut se définir comme un système quand on sait que les théories du langage et le structuralisme ont largement alimenté le mouvement.
Culte de la machine, fonctionnalisme contre expressionnisme, linguistique structuraliste, coupure avec le passé proche, autant de caractéristiques en commun avec le mouvement moderne dont les artistes minimalistes connaissent bien les enjeux.
Déjà M. Duchamp transformait les niveaux de codification des objets autant dans la lecture que dans leur élaboration et leur construction. Ainsi il bouleversait les types d’articulation signifiant-signifié. Un ready-made qu’il définissait comme « objet usuel promu à la dignité d’objet d’art par le simple choix de l’artiste [3] » amène l’objet au statut de porteur de signification qu’il détourne par la suite. Les artistes minimalistes sont plus spécifiques dans le choix de leurs objets qui doivent représenter deux choses : le minimum d’intervention (la production en série programmée) et l’absence d’émotion (par sa dissolution dans la culture de masse ou l’insignifiance acceptée de l’objet).
Le Corbusier dans son manifeste [4] exprimait l’idée que l’architecture moderne puisait son inspiration des bâtiments industriels et de leurs machines, quand l’un et l’autre arrivaient même à se confondre. Ce culte de la machine était poussé très loin comme le suggère sa propre appellation de « machine à habiter » en ce qui concerne ses unités d’habitation : des cellules d’appartement qui varient à l’intérieur d’une trame régulière de structure. Mais on voit que, chez les architectes, la machine est utilisée de façon métaphorique pour le programme, les formes ou l’utilisation de la construction. Les artistes minimalistes sont plus littéraux en empruntant soit les mécanismes de production, soit les produits eux mêmes. Ils ne cherchent pas à glorifier le progrès apporté par l’ère industrielle, comme le voulaient les modernes, mais prélèvent des éléments évocateurs de sa fabrication et les exposent, comme dans le cas de D. Judd.
Les modernes affirmaient une coupure très franche avec le passé et cela se répercute directement dans la peinture. L’abstraction remplace de plus en plus la figuration et les sujets glissent du répertoire sacré ou antique vers celui de l’homme (individu ou collectif) perçu par les sciences humaines, ou alors le sujet fait place à la pure picturalité du tableau. La question figurative écartée permet une évolution grâce aux transformations formelles. P. Mondrian se limitait aux couleurs primaires avec une composition tramée. K. Malevitch de façon très sensible a utilisé des formes simples qui questionnaient l’existence du tableau et de la peinture. Dans le domaine de la sculpture, Brancusi polissait les formes pour arriver à leur expression la plus essentielle. L’art minimal suit cette conscience esthétique en faisant disparaître toute trace du créateur physique ou moral dans l’œuvre. Le tableau ne renvoie qu’à lui même et paraît simplement répéter la maxime de P. Klee : « rendre visible ». On retrouve cette attitude dans l’utilisation que fait J. Mc Cracken des couleurs qui deviennent des objets.
Contre l’expressionnisme gestuel et toute forme organique, illusionniste ou anthropomorphique, R. Morris a recours à la géométrie euclidienne (système de transformations et formes primaires) pour effectuer ses el cubes. F. Sandback dispose ses sculptures en fils (acier, élastique, tissu) délimitant des formes géométriques simples afin de cerner l’espace plutôt que de l’occuper. Sol Lewitt explore le cube non dans sa forme mais dans sa capacité.
De façon plus globale, les modernes pratiquaient la notion d’économie comme l’annonçait l’architecte L. Mies van der Rohe : less is more. Cette économie (minimum de moyens et maximum d’effets) est fondatrice d’un type d’intelligence qu’on peut rapprocher de la métis grecque [5]. Ce qui paraît contradictoire quand on sait que l’occasion, moment où elle s’applique, est fondée sur la mémoire alors qu’on vient de voir chez les modernes tout refus d’une quelconque référence au passé. Mais cette mémoire est basée sur l’expérience propre et la notion de passé est celle du passé lointain contre celle du passé proche.
Cette tendance à rechercher une forme d’absolu dans l’art qui peut traverser les siècles se trouve revendiquée chez certains artistes minimalistes. La mise en espace de la lumière dans les constructions de T. Ando indique clairement une volonté de continuer cette tradition millénaire réamorcée par des architectes modernes comme L. Kahn ou A. Aalto.
L’art minimal, comme d’autres mouvements, reste un développement des principes amorcés par les avant-gardes du début du 20e siècle. Les manifestations visuelles de ces artistes indiquent bien les secousses qu’a créé ce tournant historique dans la culture européenne et nord américaine, dont notre société commence à réaliser l’importance.
Les produits et les procédés de l’ère industrielle perdent leur fonction première et sont dérivés en matériau syntaxique. Transformés en grammaire et en vocabulaire ils laissent ressortir leur structure pour condenser une information visuelle, reflet des préoccupations de l’époque.
Même si pour certains le minimal art reste froid et inaccessible, voire ridicule, il n’en reste pas moins que seul un changement de notre regard peut aider à en capter le message ou au moins la sensation. Si ses créateurs le veulent inexpressif et dépassionné, une certaine sensibilité est quand même sous-jacente aux œuvres. Cela se ressent chez D. Flavin qui dématérialise l’espace, abolit les frontières entre l’objet et son environnement par le blur que produit la lumière de ses néons.
Condenser la représentation dans ses moyens et ses supports pour mieux reconstruire l’art après les désastres de la IIe guerre mondiale comme l’avaient déjà fait les artistes de la première guerre. La modernité avec sa fulgurante croissance a aussi engendré les mécanismes de la terreur. La figuration classique ne suffit plus à exprimer les sentiments comme conséquences des bouleversements contemporains. Les artistes ont dû réinventer un langage en gardant les médiums traditionnel (peinture, sculpture) ou par le détournement d’objets (installations), avec une intention revendicatrice de réduction maximale.
Source : Agora.qc.ca
Minimalisme
Mouvement artistique d’après-guerre.

« Le minimalisme prône des formes géométriques simples (primary structures) épurées jusqu’à la disparition de toute expression. Les matériaux sont du registre de l’impersonnel et sont puisés dans les produits industriels ou manufacturés. »1

« Ce qui caractérise surtout le minimal art, c’est la façon dont le support devient significatif. Il est autoréférentiel car il ne renvoie qu’à lui même et amène à se questionner non pas sur un sujet, un signifié, mais le signifiant. L’œuvre comme signe est remise en cause dans le déplacement de sa relation entre le concept et l’empreinte psychique2 dans ce cas visuelle. Elle peut se définir comme un système quand on sait que les théories du langage et le structuralisme ont largement alimenté le mouvement.

Culte de la machine, fonctionnalisme contre expressionnisme, linguistique structuraliste, coupure avec le passé proche, autant de caractéristiques en commun avec le mouvement moderne dont les artistes minimalistes connaissent bien les enjeux. »2 (suite du texte)
 
*******

Références
par Pierre Grenier

On peut aujourd’hui associer au minimal art des mouvements et des artistes clés pour leur influence ou leur similitude :
      Suprematism (Malevitch) Constructivism (Tatline) Conceptual art (M.Duchamp et ses ready made) Abstract expressionism (J.Pollock, M.Rothko) Pop art (A.Warhol, R.Lichtenchtein) Neoplasticism (P.Mondrian) Brancusi. Rodchenko.
De chacun de ceux-ci, on peut clairement identifier des caractéristiques qui se retrouvent dans le minimalisme.

Les grands noms du minimalisme :

1. Arts visuels :
      Carl Andre Dan Flavin Donald Judd Sol Lewitt Robert Mangold Richard Serra Frank Stella Robert Morris Robert Ryman Dan graham Tony smith Fred sandback

2. Architecture :
 
      Tadao Ando (contemporain) Début de siècle (mouvement moderne) Le Corbusier (période puriste) Louis Kahn Ludwig Mies van der Rohe (“less is more”) Adolf Loos On peut aussi remonter à des sources telles que l’art roman, le style dorique ou l’architecture japonaise classique, pour ce qui est d’une épuration des traits, des surfaces et des volumes.

3. Musique :
 
      Philip glass Steve Reich La Monte Young Terry Riley


1. GRENIER, Pierre, Art minimal et mouvement moderne, Encyclopédie de l’Agora
2. ibid.

Essentiel
« Ici le nom se détache de ce qu’il nomme.
Ici le reflet décrit de sa fantastique écriture
Un monde où le mur n’est mur qu’autant
Que la tache de soleil s’y attache »1

1. Ici commence..., ARAGON, Jean, Le roman inachevé, Gallimard, 1956, p.255
Documentation
Bibliographie
par Pierre Grenier

Batchelor David, Minimalism, London, 1997.
Battcock Gregory, Minimal Art : A Critical Anthology, New York 1968, reprinted 1995. With a new introduction by Anne M.  Wagner. New-York, E.P.Dutton & co, 1968
Buskirk , The Duchamp Effect, Martha and Mignon Nixon (eds.), Cambridge Mass., 1996.
Chomsky Noam, The Minimalist Program, MIT Press, Cambridge, Massachuesetts, 1995
Chomsky Noam, "Bare Phrase Structure". In : Webelhut, G. (ed.), Governement and Binding Theory and the Minimalist Program. Blackwell, Oxford, U.K.
Colpitt Frances, Minimal Art : The Critical Perspective, Washington, 1993.
Greenberg Clement, “After Abstract Expressionism”, Art International, vol. 6, no. 8, (October, 1962), pp. 24-32.
Krauss Rosalind, The Originality of the Avant-garde and Other Modernist Myths, (MIT 1997), pp. 260-274.
Krauss Rosalind, “Sense and Sensibility : Reflection on Post ‘60s Sculpture”, Artforum 12, (November 1973), pp. 43-52.Le Corbusier, Vers une architecture, Vincent, Fréal et Cie, 1958
Loos Adolf, Opel Adolf, Mitchell Michael, Ornament and Crime : Selected Essays, Paperback, 1997
Meyer James, Minimalism, London, 2000
Mollet-Viéville Ghislain, Art Minimal et Conceptuel, éd.Skira. 1995
Rowe Colin, The Mathematics of the Ideal Villa and Other Essays, Boston, MIT Press, 1976

P.-S.

Las Nuevas Tendencias Arquitectónicas

as nuevas tendencias han surgido en países Centro y han influenciado hasta la imitación a los países Periferia ; no resulta fácil liberarse de sus influencias.
Sin embargo, la misma estructura económica que propicia esta influencia cultural, es la misma que impide su desarrollo, ya que los factores que propician (economía, política, etc) estas tendencias, son totalmente diferentes, y llegan a la proyección de un producto ajeno, diverso, contradictorio, caro, e inviable para los países Periferia. Hoy día, son numerosos y complejos los problemas que aquejan a la arquitectura, en un mundo globalizado, donde la economía y la política, tienen mayor peso, que las estructuras sociales y culturales. Estas discrepancias nos llevan a una crisis en arquitectura. Muchas y algunas que considero importantes son :
- En la arquitectura global, existe un hecho, la de fenómenos globales proyectados al estrellato en su personalización en una cincuentena de figuras, arquitectos famosos, triunfadores al estilo Hollywood. Con el reconocimiento de la exaltación de su personalidad pública.
- El aspecto más relevante, es el mercado, detrás de él están manipuladores que gobiernan las finanzas y políticas de casi todos los países del mundo. Aquí la arquitectura es lo de menos, lo importante es el movimiento especulativo de capitales, construir por construir sin un propósito firme y concreto de uso, sin objetivos definidos y claros.
- Devaluación de la apreciación de la arquitectura y del arquitecto por parte del sector privado y de la administración pública.
- El abandono por parte de los profesionales de sus objetivos sociales y culturales, y la visión economicista, ultraliberal y competitiva que preside irracionalmente toda la actividad productiva, aplicada al campo de la creación arquitectónica.
- En construcción hay una caída de la calidad y por consecuencia, una reducción de la edad de vida de las viviendas desde el actual de setenta años o más hasta los veinte años. La bajada de la calidad se estimula para propiciar, un incremento del consumo energético. En el futuro se trata de construir mal.
- Proliferación de manierismos individualistas, en búsqueda de la originalidad. El estilo es el mismo artista.
- Los determinantes políticos y culturales configuran un marco en el que hacer arquitectura en condiciones profesionales dignas es imposible.
- Vimos un mundo dominado por la información y el capital , factores que operan en un estrato superior al de la política. No reconocen fronteras ni toman en cuenta los problemas humanos, produciendo sobreabundancia de lenguajes de comunicación.
Las consecuencias no sólo es la degradación y el desprestigio de la profesión, si no existencia de una arquitectura ajena a la sociedad y a los individuos, lejos de su tiempo y espacio.

Antecedentes de las Nuevas Tendencias

La modernidad se inaugura impulsada por grandes filosofías unificantes de la historia sustentadas en el desarrollo de los modos de producción. Sobre la modernidad se basan ideologías del progreso y con la quiebra de la modernidad se produce la quiebra de la visión del progreso y de la historia.
La quiebra de la modernidad, tendría su correspondencia arquitectónica en la discontinuidad, y la fragmentación, en cierta erratilidad de las formas.
El movimiento posmoderno nace en oposición al estilo internacional, plantea una nueva concepción arquitectónica en la que sus preocupaciones centrales recaen en el espacio habitable, el cual puede analizarse racionalmente, y proponen una nueva estética para sustituir la derivada de las composiciones basadas en la columna y el entablamento clásico.
El rechazo al historicismo les coloca en el extremo opuesto, al sustentar el rompimiento con toda tradición e incluso con la liga de la edificación a su contexto natural y rechazar, la cultura popular en la construcción. El movimiento moderno, supone que la arquitectura solo responde a condicionantes constructivas, funcionales o lógicas ajenas a la sociedad, empezando así a construir un estilo en donde prevalece un juego de formas carentes del contenido original : el estilo funcional — no el funcionalismo, el primero se refiere a la forma externa de la construcción, el segundo alude a la solución funcional de los espacios — o estilo internacional. La arquitectura nacida con una significación de lo moderno, perdió éste al cambiar las condiciones sociales que le dieron origen, para convertirse en forma imitada hasta el cansancio.

El Camino hacía la Crisis Arquitectónica : la Economía

Para comprender su ubicación en nuestro tiempo, hay que considerar el contexto en que surgen. Walter Gropius, avisaba e intuía que estamos en el umbral de un nuevo esfuerzo de creación. Señalaba que la unidad de ambiente y cultura se había perdido, se tenía, un ambiente caótico, feo, desolador, del cual deriva un acento en “la lucha capital-trabajo y malas relaciones sociales”.
Ese esfuerzo de creación es la respuesta a un impulso económico dentro del cual se van a posibilitar las inversiones en arquitectura, con un enfoque divergente del movimiento moderno y que va a iniciarse con el estilo internacional derivado de Mies van der Rohe y el abuso de las cajas de vidrio.
Dentro del cuadro general del desarrollo económico, sobre todo en los países de alto desarrollo tecnológico e industrial, se da un despegue consecuencia de los efectos inmediatos de la Posguerra en los años 50. Las curvas Kondratieff, permiten analizar las fases cíclicas de la crisis y expansión del sistema capitalista, mediante las cuales se advierte un crecimiento económico a mediados de los 50 y principios de los 60, un nuevo periodo de crisis y luego una fase de crecimiento a fines de los 80 y principios de los 90 ; ciclos de más o menos 25 años, con fases largas de cerca de 50 años en la evolución económica que se ha caracterizado como “economía-mundo-capitalista”. Las crisis no son simétricas ni siempre adoptan un patrón similar, ni se dan en áreas iguales. El desplazamiento de capitales hacia ramas económicas que ofrecen mayor plusvalía, la competencia entre grandes capitales monopólicos y supranacionales, el imperativo de éstos para renovar procesos y plantas productivas ante la competencia, y renovar la tecnología, incrementar la intensidad de capital en la producción, etc., son algunos de los incentivos del sistema al que se someten las empresas, incluyendo a la de la construcción. Son dos momentos claves coincidentes con los de mayor intensidad en el surgimiento y expansión de corrientes recientes en la arquitectura : el posmodernismo, surgido a fines de los años 50 y primeros de los 60 ; y luego el deconstructivismo, que se empieza a incubar a mediados de los años 80 para consolidarse y empezar su divulgación al final de la misma década.
De esta coincidencia no debe derivarse una limitada relación causa-efecto, o derivar un patrón de dependencia entre economía (causa) y arquitectura (efecto), con la tentación de extenderle como instrumental analítico a otros momentos de la historia de la arquitectura. Hay que considerar y reformular postulados tradicionales y comunes, para reconstruir la historia de la arquitectura con criterios y enfoques que consideran estas nuevas determinaciones.
Ambas corrientes han aparecido en países de alto desarrollo industrial y económico. Su influencia, con el posmodernismo, se ha extendido dando lugar a un debate cultural, que está dejando de ser actual y útil. En el deconstructivismo, el debate apenas asoma y aún no llega del todo a nuestros ambientes culturales y artísticos. Desconocemos los calificativos que se han puesto en la polémica : los placeres de la incomodidad, proyectos de cortar y romper, composiciones sobre descarrilamientos rusos, terrorismo arquitectónico, posmoderno cismático o minimalismo sucio, son algunos.
Ambas tendencias arquitectónicas, al aparecer y divulgarse, abren el debate, pero se les distorsiona y oculta, dando lugar a reacciones que tienden a defender y mantener intereses profesionales de arquitectos. Simulando un poco, tomando de aquí y de allá para ganar imagen. Posmodernismo y deconstructivismo empiezan por ser crítica y disidencia. Inicialmente son llamativos y seducen casi instantáneamente. Son grandilocuentes y provocadores como forma arquitectónica, costosos, y difíciles de captar en una primera apreciación de su técnica compositiva. Además, ambos profundizan la cultura de las estrellas de Hollywood . Aquella disidencia y provocación iniciales, lo aparatoso y caro, son su virtud, por lo novedoso, y les permitirá ser sometidos al proceso de absorción cultural y convertirlos en mercancía : satisfacen exigencias de la estética de las mercancías.
La arquitectura ha sido convertida, además de instrumento de poder por su costoso adorno e imponente apariencia, en un tipo de mercancía que, pierde su contenido crítico de oposición y provocación y se vuelve objeto de aparador, se le coloca en esa vía de su divulgación e imposición en el gusto de los sectores subalternos de la sociedad.
La arquitectura, como producto técnico-cultural ha sido convertida en mercancía y adopta cada vez más las alternativas de ésta. De aquí al predominio de la moda, el consumismo y la publicidad engañosa, que el posmodernismo y la deconstrucción han dado asumido plenamente. Estamos, ante otra historia de la arquitectura, tal vez sometida a ciclos de variación, cada vez más cortos quizá y ante una próxima diversidad de ofertas mercantiles de formas y conceptos arquitectónicos, bajo la máxima : todo se vale.

El Postmodernismo

Las tendencias culturales tienen una manera de reflejar los asuntos intelectuales y políticos, más amplios dentro de una sociedad. Así sucede con el postmodernismo, término que se utiliza para referirse a disciplinas artísticas y arquitectura.
Es un fenómeno intelectual de interés para la vida norteamericana. Su método consiste en la repetición y la yuxtaposición -una mezcla de cultura superior y popular- y su actitud típica es la ironía. El postmodernismo se refiere a determinada constelación de estilos y tonos en el trabajo cultural : el pastiche, lo vacío ; un sentido del agotamiento ; mezcla de niveles, formas, estilos ; copia y repetición ; una autoconciencia sobre la naturaleza formal y fabricada de la obra ; un rechazo de la historia ; una forma de aprehender y experimentar el mundo y nuestra ubicación, o desubicación, en él.
En la sensibilidad posmodernista, la búsqueda de unidad aparentemente se ha olvidado por completo. En la actualidad tenemos la textualidad, el cultivo de superficies que se refieren sin cesar a otras superficies, que rebotan contra ellas, que se reflejan en ellas. Se hace hincapié en su arbitrariedad, en su edificación ; se interrumpe a sí misma. En vez de un solo centro, hay un pastiche, una recombinación cultural. Cualquier cosa puede sobreponerse a otra. Todo tiene lugar en el presente, “aquí”, es decir, en ningún sitio en particular. La obra se desarrolla sin ilusiones : todos desempeñamos nuestros papeles en forma deliberada. Todo ha sido hecho ya. El choque rutinario, se presenta con ironía. El posmoderno se halla fragmentado, inestable, descompuesto ; al final, sólo hay discurso. Donde hubo pasión, o ambigüedad, hay ahora un colapso del sentimiento, un vacío. La belleza, privada de su poder crítico, se ha reducido a un elemento decorativo de la realidad, y se ha borrado del postmodernismo. La cultura superior no se sirve ya de la cultura popular ; se confunde en ella.
El postmodernismo reconstruye la relación entre premodernismo y modernismo. Define el momento cultural presente como una secuela, aunque no sea cierto. Se conoce al postmodernismo por lo que lo acompaña.

Oscurece al modernismo.

Los lineamientos del postmodernismo están presentes en las versiones del modernismo ; es la personificación actual, de un modernismo que sigue desarrollándose. Roger Shattuck, ha asegurado que el cubismo, el futurismo y los espiritualistas artísticos compartían un principio respecto de la composición : la mezcla de estados mentales, de diferentes tiempos y lugares, de distintos puntos de vista. El collage, el montaje, son la esencia modernismo.
El modernismo tuvo que partir en pedazos lo que el postmodernismo está mezclando y asociando. La multiplicación de perspectivas del modernismo condujo a la dispersión de voces del postmodernismo ; el collage modernista hizo posible la unión de géneros posmodernista. En la yuxtaposición posmoderna hay una autoconciencia deliberada. Los posmodernistas de hoy están hastiados, lo han visto todo, lo que los distingue es su carácter intencional y su sentido del agotamiento. V a más allá de la moda en arquitectura, pues gran parte del impulso recombinatorio, el vacío, la ironía sobre sí misma, el juego de superficies, la autorreferencia y el ensimismamiento que lo caracterizan aún están entre nosotros. Adquiere significado porque su amalgama de sentidos ha penetrado la arquitectura, la novelística, la pintura, la poesía, la planificación urbana, la música, la televisión y muchos otros campos. El posmoderno nace en EUA, ya que la yuxtaposición es de las cosas que mejor hacen los estadounidenses. Se trata de una corriente definitoria de la cultura de ese país. Los EUA son mitos esenciales, homogeneizaciones y oligopolios, una cultura inmigrante, un paquete sorpresa. N o es exclusivamente, estadounidense, pero en Estados Unidos, la vanguardia artística, tenía que levantarse en contra del modernismo de la posguerra venerado, tenía que derrumbar al ídolo Arte Moderno.

El Desconstructivismo

En este contexto nace el desconstructivismo, que no representa un movimiento ni un estilo nuevo. No es un credo, y ni tiene reglas de oro, es la confluencia desde 1980, del enfoque arquitectónico en las obras de unos cuantos arquitectos, en diferentes lugares del mundo, que da como resultado formas similares.
Es en la exposición de 1988, Desconstructivist Architecture, en el Museo de Arte Moderno de Nueva York, donde se dio el nombre de desconstructivismo a esa arquitectura.
Los temas formales que se repiten son la súper imposición en diagonal de formas rectangulares o trapezoidales. Los cambios evidentes son los contrastes entre las imágenes retorcidas de la arquitectura desconstructivista, en contraposición de las imágenes puras del estilo internacional. La fragmentación de la forma implica que las reglas de composición tradicionales ya no son validas, pero no era necesario romperlas, solo torcerlas un poco e incorporarles cierta fluidez que proporcione movimiento a los espacios propuestos.
El desconstructivismo propone un postmodernismo multiestilistico individualista. Existen diferencias sustantivas entre sus exponentes, en cuanto a lo que entienden y desean del desconstructivismo. Algunos de ellos son, apasionados del cambio por el cambio mismo. Su planteamiento tiene como base el descomponer. Algunos rasgos formales son : el abandono de la vertical y la horizontal ; la rotación de los cuerpos geométricos alrededor de ángulos pequeños ; las construcciones con un efecto provisional ; la descomposición de las estructuras hasta el caos aparente y la actitud de form follows fantasy .
El desconstructivismo, es una mezcla de interpretaciones personales, con algunos puntos en común : el cambio y la diferenciación de formas arquitectónicas pasadas. Cae en el extremo opuesto, creando una síntesis de lo pasado y lo reciente. Se crea pretendidamente un estilo afuncional, irracional, inútil, antiético, ininteligible ; donde la forma se adquiere por la forma misma, en favor de un anti-internacionalismo, de una anticomercialización, que no se logra.

Conclusiones

En la evolución de la arquitectura, a partir del modernismo, hay una ruptura con el pasado, una ruptura con las sociedades, culturas, y tradiciones. Sin olvidar también la negación del propio confort y por consiguiente del ambiente.
La nueva arquitectura se basa en una cultura de mercado y economía. Las nuevas tendencias en arquitectura son un rompimiento con todo lo que es posible romper, en aras de que la novedad genere dinero. Son frívolas y carecen de sentido de bienestar social.
El nuevo academicismo formal, va desde el modernismo caracterizado por volúmenes cúbicos cubiertos de vidrio, ventanas corridas de piso a techo, hasta el desconstructivismo y su negación de la horizontal y la vertical.
Construcciones sin respeto por el contexto natural y cultural. Despreciando las tradiciones constructivas y los modos de vida. Es una crisis general en la arquitectura : formal, porque la forma es la misma, funcional, por que no importa si nada funciona, ambiental, por que los materiales y métodos constructivos son altamente contaminantes, de identidad, por que no tiene nada que ver con el individuo y de valores, por el resultado.
Hoy el arquitecto no tiene esencia arquitectónica que lo identifique, se pierde en la nueva concepción del espacio habitable. No hay capacidad creadora, todo es copia a la forma sin importar nada más. En México, tenemos muchos más problemas que estos, ya que nuestra economía y problemas sociales genera la necesidad de una arquitectura para el pueblo. Sin embargo, no podemos cerrarnos a la arquitectura extranjera o a la internacional, pero debemos tener prioridades a fin de satisfacer nuestras necesidades más elementales.
Los arquitectos estamos cada vez más lejos de la arquitectura, estas tendencias, quieren llevarnos, arrastrarnos consigo, que seamos… somos parte de su juego.
Aída Barrera Álvarez [1], Arquitectuba.com.ar

L’utile est-il le beau ?

 
 
Dans le riche et parfois difficile dialogue qui s’établit entre le bibliothécaire et l’architecte intervient toujours la récurrente question de la fonctionnalité. Au bibliothécaire la réflexion sourcilleuse sur l’usage futur d’un espace dans lequel, bien inconsciemment, il transpose parfois le vécu de pratiques actuelles. À l’architecte le souci de signifier une complexe richesse d’activités et de représentations symboliques. Le débat n’est pas ici manichéen, et si les bibliothécaires savent être sensibles à la cohérence novatrice d’une architecture, les architectes ne sont pas étrangers à la question de l’utilité, dont les impératifs nourrissent leur pensée. Les bibliothécaires réclament de l’utile qui soit également beau. Mais le mariage entre le beau et l’utile ne se crée pas par juxtaposition. Et si le beau s’établit sans référence à l’utilité, la question inverse a pu être posée : l’utile est-il le beau ? L’histoire de l’architecture est riche d’enseignements sur cette question.
JPG - 45.5 ko
Ce Pont, conçu par EIFFEL, enjambe le Lay, Lavaud (France).
C’est utile...c’est donc forcément beau...
Hormis ses lignes pures, ses volumes géométriques affirmés et sa célébration des nouveaux matériaux industriels, célébration sous-tendue par l’idée que la construction n’est plus un art mais une science, l’architecture moderne a semblé - avant tout - revendiquer le fait d’être fonctionnelle. Il revient à l’architecte américain, Louis Sullivan, d’être considéré comme le fondateur de ce courant fonctionnaliste moderne du fait de son fameux aphorisme «  Form follows function  » [1] , soit« la forme découle de la fonction ». Fort de cette formule, le fonctionnalisme est devenu l’aspect le plus réducteur et le plus schématique du rationalisme architectural, un mouvement profond qui, depuis le XVIIIe siècle, s’oppose à l’architecture traditionnelle en revendiquant une approche non tant stylistique que raisonnée, au sein de laquelle la problématique de l’usage n’est qu’une des considérations débattues.

Architecture parlante et fonctionnalisme symbolique

En dépit de la polarisation sur ce thème, apparue au tournant du siècle dernier, et qui a accompagné le développement de toute l’architecture moderne, il ne s’agit point d’une question véritablement neuve. Déjà Vitruve, dans ses Dix livres d’architecture, seul traité qui nous soit parvenu de l’Antiquité, demandait que l’apparence d’un bâtiment soit en accord avec sa vocation fonctionnelle. Par la suite, au XVIIIe siècle, les notions de « caractère »et d’« architecture parlante » apparaissent et renvoient notamment à des considérations participant à cette question. L’architecture semble devoir se charger de symboles issus de la destination , même de l’édifice et non point hétéronomes. Or chaque destination appelle un sentiment particulier correspondant à la nature de l’édifice et aux activités qui y prennent place : la prison doit inspirer la crainte, le palais de justice évoquer le châtiment, le théâtre inviter au plaisir, la bibliothèque célébrer et transmettre le savoir. On en appelle donc à une architecture expressive où les formes symbolisent le contenu d’une construction.
Dans un article intitulé « Architecture » paru en 1910, le célèbre architecte et polémiste viennois Adolf Loos réactive ce principe et réclame que « les oeuvres de l’architecture parlent au cœur de l’homme, éveillent des émotions. La tâche de l’architecte est de provoquer des émotions justes. Une chambre doit être plaisante, une maison sourire au passant, l’inviter à entrer. Un palais de justice doit faire le geste de la loi qui menace ou avertit. Une banque doit vous dire : dépose ton argent, il sera bien gardé ». [2] Cependant, à chaque fois, il s’agit d’exprimer la destination d’un bâtiment et non tant les activités précises qui y prennent place, contrairement à la fameuse formule de Sullivan.
Étienne-Louis Boullée, dans son projet de bibliothèque royale élaboré en 1788, souscrit à ce principe d’un fonctionnalisme à caractère symbolique, comme l’illustre l’immense façade plate ornée de deux atlas portant le globe céleste figurant l’immensité de l’univers et, du même coup, celui du savoir. De son côté, la façade de la bibliothèque Sainte-Geneviève fait clairement référence à ce principe, puisque Henri Labrouste s’emploie à y faire graver le nom des auteurs dont les ouvrages sont très précisément sur les rayonnages, de l’autre côté de la paroi de pierre.

Une origine contestée

Par-delà la personne même de Sullivan, l’un des pères des gratte-ciel, l’idéologie fonctionnaliste va durablement marquer la scène américaine, pour autant elle n’apparaît pas à Chicago, brusquement, après le grand incendie de 1871. Au contraire, elle constitue le point d’aboutissement de réflexions menées depuis longtemps dans des sphères qui outrepassent largement celles de l’architecture. Selon l’historien et sociologue américain, Lewis Mumford, le premier théoricien du fonctionnalisme serait le sculpteur Horatio Greenough qui a formulé l’exigence de la Beauté utile. [3]
JPG - 22.3 ko
Washington de Horatio.
Greenough, 1841.
Un principe qui permettait de se défaire du faux-semblant que représentaient le pastiche ou les revivals, mais aussi des décorations appliquées perçues comme des déguisements. La vraie beauté dépendait de la parfaite adéquation entre la forme et la fonction. Greenough en retrouvait la trace autant dans les outils primitifs que dans les navires ou les ponts des temps modernes. Aussi pourquoi ne se retrouverait-elle pas dans l’architecture ? Pierre Francastel conteste à Greenough la primauté de la pensée fonctionnaliste moderne et l’attribue à Eugène Viollet-le-Duc. Puisant son modèle dans l’architecture gothique, ce dernier souligne dans ses Entretiens sur l’architecture, publiés de 1863 à 1872, combien, à cette époque heureuse, on se préoccupait de « l’alliance de la forme avec les besoins et avec les moyens de construction » [4] . Viollet-le-Duc en appelle à la raison et à son devoir de gouverner les formes. Dans le sixième entretien, il explique que l’architecture doit tenir compte de deux paramètres : d’une part, l’imagination de l’artiste, d’autre part, la nécessité imposée par le programme qu’il faut satisfaire. Mais les architectes, constate-t-il, sont trop abusés par les styles du passé pour que leurs productions puissent véritablement répondre aux attentes et besoins. Par contre, note-t-il, à l’unisson avec Greenough sur ce point, les constructeurs de machines, les ingénieurs confrontés à l’élaboration d’un navire à vapeur ou d’une locomotive ne cherchent pas à reproduire un bateau à voile ou une diligence, mais à produire des oeuvres qui ont leur caractère propre dérivant de leur destination [5].
Ensemble, ils vantent les organisations où chaque partie accuse une fonction en adoptant la forme nécessaire à celle-ci. Le Bauhaus reprendra, dans les années vingt, l’idée de la forme qui puise dans l’utilisation et la fonction sa justification. Forme qui sera produite industriellement de manière à éviter toute subjectivité et tout affect. La bibliothèque interuniversitaire de Nanterre, conçue par Édouard Albert en 1966, et celle de la faculté d’histoire à Cambridge, dessinée par James Stirling en 1964, rendent compte, chacune dans une facture différente, de l’influence persistante d’une telle pensée.

Formalisme versus fonctionnalisme

La rapide évocation de ces différents exemples démontre combien le concept de fonctionnalisme va servir de slogan aux tendances les plus variées de l’architecture moderne et, en conséquence, provoquer nombre de polémiques acharnées. L’une des plus célèbres oppose Le Corbusier au critique d’art tchèque Karel Teige à la suite du projet du Mundaneum conçu, par le premier, en 1927.Fondé sur la figure de la spirale, le bâtiment principal, destiné à abriter le musée mondial, adopte la forme d’une pyramide. Teige reproche à l’architecte de recourir au principe, somme toute classique, de la monumentalité c’est-à- dire d’avoir cédé à une approche esthétique et formaliste. Au contraire, écrit-il, « l’architecture doit produire des instruments », puisqu’elle a été soustraite du domaine des arts pour venir se ranger dans celui des sciences. Le Corbusier raconte que la critique a semé le doute jusqu’à ses proches collaborateurs. Ainsi, un jour, la conversation allait bon train à l’atelier. « Tout d’un coup l’argument péremptoire sortit d’une des bouches : "Ce qui est utile est beau" ». Au même moment, Alfred Roth (tempérament fougueux) envoyait un grand coup de pied dans une corbeille à papiers en treillis métallique qui se refusait à engloutir la masse de vieux dessins qu’il était occupé à détruire. Sous la pression énergique de Roth, la corbeille d’un galbe techniquement sachlich (expression directe du tressage des fils) se déforma et prit l’allure que montre ce croquis. Tout le monde s’esclaffa. "C’est affreux !", dit Roth. "Pardon", lui répondis-je, "cette corbeille contient maintenant bien davantage ; elle est plus utile, donc elle est plus belle ! Soyez conforme à vos principes !" [...] J’ai de suite rétabli une balance équitable en ajoutant : "La fonction beauté est indépendante de la fonction utilité..." » [6] .
Le Corbusier ne peut s’aligner sur les positions de Teige car, dans sa conception de l’architecture, l’utilité et la beauté ne peuvent être réduites à deux ordres antagonistes. Il refuse de subir la détermination de la fonction comme les Allemands de la neue Sachlichkeitle revendiquent, et postule une solution heuristique où les activités relèvent de l’outillage. En conséquence, les fonctions procèdent des moyens, mais pas de la fin, comme le démontre admirablement la bibliothèque d’Exeter achevée par Louis Kahn (1967-1971) qui, de plus, revendique, pour ce type d’institution, le recours à une certaine monumentalité.
Si la polémique entre Le Corbusier et Teige fournit l’occasion à l’architecte de clarifier sa conception, notamment à l’égard de certaines de ses positions développées dans les années vingt, jamais il ne prit ouvertement ses distances vis-à-vis du fonctionnalisme comme le fit Alvar Aalto au début de la seconde guerre mondiale. En 1940, l’architecte finlandais rédige un texte intitulé « L’humanisation de l’architecture », une contribution qui correspond au moment où il se montre intimement préoccupé par les besoins essentiels de l’homme, qu’ils soient d’ordre physique, psychologique, social ou culturel. Il s’oppose au traitement de l’individu en tant qu’élément indifférencié d’une masse innombrable. Dans cet article, Aalto évoque les avancées que l’idée fonctionnelle a permises, mais il reproche qu’elles n’aient pas été menées jusqu’à leur terme. Il distingue ainsi deux temps dans le développement du fonctionnalisme. Le premier, dit « fonctionnalisme technique », a vivifié l’architecture au point de lui permettre de l’ornière ou le classicisme l’avait plongée. Pour autant, dans un deuxième temps, il s’agit dorénavant de la rendre pleinement efficace. Dans ces conditions, « le fonctionnalisme technique n’est correct que si on l’élargit de manière à lui faire également couvrir le secteur psychophysiologique » [7] .
Le but d’Aalto consiste à rendre l’architecture meilleure et donc plus humaine. Cela implique l’élargissement du fonctionnalisme et son ouverture à des considérations autres que techniques ou matérielles. Élargissement que l’on constate entre sa première bibliothèque réalisée à Viipuri (1927-1935), belle expression d’un fonctionnalisme strict avec ses volumes principaux correspondant à des entités programmatiques spécifiques, et celles de Seinäjoki (1963-1965) ou de Rovaniemi (1963-1968), qui témoignent d’une approche bien plus sensible des paramètres liés à l’usage et à la perception.
JPG - 45.2 ko
Bibliothèque de Viipuri.
Alvar AAlto.
Mies van der Rohe, ancien directeur du Bauhaus réfugié aux États-Unis, portera un coup final au fonctionnalisme en 1952. Devenu le chef de la seconde école de Chicago, l’instigateur d’un type particulier de gratte-ciel dans le sillage de son « Seagram Building » à New York, Mies van der Rohe déclare qu’il faut complètement revoir la pratique issue du fonctionnalisme. « Nous inversons, en faisant une forme pratique et satisfaisante que nous remplissons ensuite de fonctions. Aujourd’hui, c’est la seule façon de construire, puisque les fonctions de la plupart des bâtiments sont continuellement changeantes, mais économiquement, les bâtiments ne peuvent pas changer » [8].
D’un coup, il rend obsolète la formule de Sullivan en proposant la création d’une forme capable, vaste et homogène, susceptible d’encaisser les incessantes modifications programmatiques que la condition contemporaine impose à un édifice. Ainsi, à l’apparence expressive des volumes mimant le fonctionnement intérieur, il oppose une grande enveloppe, une sorte de containeruniversel et polyvalent, délimitant une aire protégée pouvant abriter n’importe quelle activité. D’une certaine manière, la Bibliothèque publique d’information (BPI) du Centre Georges-Pompidou - du moins dans sa version initiale voulue par Renzo Piano et Richard Rogers - constitue un heureux avatar de cette pensée. S’étendant sur les mêmes plateaux que ceux occupés par les espaces du musée, la BPI était régie par un principe extensif de flexibilité qui rendait presque tous les aménagements possibles. Il en va de même avec la bibliothèque Viala à Saint-Pierre-des-Corps, de Jean-Yves Barrier, qui se présente comme un hangar, un vaste volume capable transformable selon les besoins à venir.

Contestation et dépassement

Les années soixante ont été celles de l’informe, ce qui s’est traduit, en architecture, dans une sorte d’échappatoire de type proliférant, sous-tendue par une logique fondée sur des trames et des éléments répétitifs conçus selon un principe de combinatoire. Mais cette complexité brusquement rapportée ne put faire illusion d’autant qu’elle partageait avec le Mouvement moderne une même foi dans la technique et la standardisation.
L’acte de décès du fonctionnalisme est finalement paru en 1974 sous la plume du critique américain Peter Blake. Il publia un article - vite transformé en livre - intitulé « Form follows fiasco ».Le déferlement du postmodernisme a définitivement contribué à enterrer toute référence à une démarche fonctionnaliste. Depuis, deux voies ont été empruntées, soit la célébration de la forme pour la forme dans une sorte d’exubérance joyeuse, soit la primauté de la tectonique et des effets orchestrés par le jeu des parois vitrées. La Cité de la musique de Christian de Portzamparc relève de la première voie, avec son travail volumétrique reposant sur l’effet de présence, tout comme les médiathèques de Villeurbanne (Mario Botta, architecte) ou celle d’Orléans (Dominique Lyon, Pierre du Besset, architectes). Par contre, l’immeuble Cartier, de Jean Nouvel, ou son palais des congrès à Tours, reposent entièrement sur des effets de surface et de transparence qui, naturellement, se développent de manière totalement indépendante du programme pour lequel l’édifice est construit. La bibliothèque municipale du 13e arrondissement de Paris (Rubin, architectes) rend compte de cette dimension, mais c’est, principalement, la Bibliothèque nationale de France qui, par le travail sur l’aspect et la mise en oeuvre des quatre tours vitrées en lieu et places de l’expression des salles intérieures, illustre cette seconde voie.
Référence bibliographique

Les autres architectures modernes

o foro   
Reconstruction du Havre, ISAI.Il s’agit notamment d’études basées sur l’oeuvre et la personnalité d’architectes tels que Perret, Pouillon, Moya, Plecnik, Tessenow et Schumacher, volontairement hétérogènes, dont l’objectif principal est de fournir un spectre, le plus ample possible, de ce qui nécessairement devra être reconductible à l’idée même d’architecture moderne (et qui rend implicite, dans ce sens, une définition de modernité qui va au-delà des limites les plus communément reconnues). En effet, l’épopée mythique du Moderne s’est effritée petit-à-petit, donnant naissance à des fragments doués d’une autonomie propre. Aujourd’hui il est de plus en plus difficile de rétablir l’unité d’une expérience qui se révèle composite et hétérogène, parfois même contradictoire. Nombreux sont ceux qui, architectes, critiques ou historiens, se sont adressés ailleurs, en explorant et en récupérant des expériences et des personnages oubliés ou marginalisés.
Et là se posent deux problèmes fondamentaux. Le premier consiste à comprendre si, et dans quelle mesure, des architectes qui généralement n’appartiennent pas à la mythologie reconnue et acceptée par les histoires de l’architecture les plus répandues, peuvent être considérés modernes.
Le deuxième problème consiste, lui, à reconnaître les raisons et les finalités de telles récupérations. Il ne faut pas oublier qu’en général ces autres modernes ne sont pas facilement accessibles (justement du fait de leur marginalité). Cette inaccessibilité est d’ordre historico-critique, mais aussi d’ordre pratique, puisque très souvent il n’y a pas d’études sérieuses et complètes sur ces personnages qui sollicitent de plus en plus l’intérêt des spécialistes et des architectes.
JPG - 14.1 ko
Auguste Perret
Buste de l’architecte exposé dans la salle Cortot à Paris.
Ces problèmes sont de natures très différentes mais il apparaît évident qu’ils ne peuvent pas être résolus isolément. En effet, il serait impossible d’élargir ou de modifier le concept même de modernité en faisant exclusivement référence au patrimoine sur lequel s’est bâti, par exemple, l’histoire du Mouvement Moderne (à condition que l’usage des majuscules soit philologiquement acceptable).
Peter Behrens et Auguste Perret étaient-ils modernes ? Theodor Fischer l’était-il ? Et Ridolfi ?
Une curieuse vision caractérise beaucoup de manuels de l’histoire de l’architecture ; une sorte d’évolutionnisme architectural selon lequel des limbes de proto-modernité (ou proto-rationalisme) enveloppent tous ceux qui sont considérés comme précurseurs d’une chose qu’ils ne sont pas encore dignes de représenter. C’est le cas de Behrens et de Perret, même si aujourd’hui il nous paraît difficile de ne pas en reconnaître la modernité. Le discours est encore plus complexe pour Fischer, sans aucun doute l’un des grands maîtres de l’architecture moderne allemande, trop souvent exclu ou oublié. Le cas de Ridolfi est aussi compliqué parce qu’il a un certain parfum d’« hérésie », surtout au vu des caractères propres au rationalisme italien.
Même s’il ne s’agit que de quelques exemples désordonnés, il est évident que derrière ces noms se cache un problème plus vaste et profond, qui franchi nécessairement le fossé des générations (dans le sens où il n’y a pas que ceux qui sont nés dans l’avant-dernière décennie du XIXe siècle qui peuvent aspirer au titre de modernes). Et il est aussi évident que des situations de ce type peuvent être relevées dans tous les pays européens et il serait sans doute possible de retrouver l’équivalent helvétique d’un Ridolfi.
Mais le sens ultime de ces interrogations va vers l’élargissement de l’univers architectural auquel il est non seulement légitime mais souhaitable de se référer. C’est pour cette raison - et non pas en vertu d’une dispute idéologique abstraite - qu’il est nécessaire de s’interroger sur la modernité de ces architectes, c’est-à-dire de savoir si leur enseignement est toujours valable ou capable de suggérer de nouvelles voies de recherche. Et ce point nous amène directement au deuxième problème.
L’étude de ces personnages, de leurs expériences et de leurs aspirations est non seulement utile mais même nécessaire en face des lacunes de notre culture et de l’indéniable incapacité de résoudre les innombrables problèmes avec lesquels notre discipline se trouve confrontée. Au-delà des polémiques stylistiques, au-delà des différences linguistiques, un des caractères les plus fréquents dans l’oeuvre de ces autres architectes est leur réflexion continuelle sur la ville, sur son développement et sur sa transformation. Attitude qui se révèle particulièrement intéressante aujourd’hui, face à l’interrogation générale au sujet du futur de nos villes historiques et au sujet de la capacité de l’architecture contemporaine de se mesurer avec le passé.
Au-delà de toute polémique donc, il faudra reconnaître que l’apport spécifique et le plus original de l’architecture « rationaliste » est adressé à la « ville nouvelle » plutôt qu’à la confrontation directe avec la ville ancienne. Il faut souligner que, dans ce sens, le travail de nombreux protagonistes est moins connu ou peu étudié justement parce que l’image véhiculée par la critique militante est décidément tournée vers d’autres aspects. Pour citer un exemple, il suffit de penser au cas de Terragni et de voir comment l’analyse et les études des résultats formels de ses édifices sont prépondérants par rapport à l’illustration, ou au déchiffrement d’une stratégie urbaine qui ne doit pas être négligée.
Il est possible de répliquer que tous les maîtres de l’architecture moderne se sont mesurés avec la ville historique en obtenant des résultats positifs et une telle objection ne pourrait recevoir que notre accord. Il faudrait néanmoins accepter le fait - en soi assez évident - que les rares exemples se présentent toujours comme des solutions extraordinaires et particulières face à la ville historique, alors que d’autres tendances, dans notre siècle, ont privilégié un type de réponse plus paisible, beaucoup plus orientée vers une généralisation de l’expérience et explicitement intéressée à une continuité avec la tradition. Penser qu’à partir de ces fondements il n’est pas possible de produire des architectures « modernes » est sans doute un acte de simplification. Dans ce sens, notre culture est encore victime du lieu commun selon lequel en face de l’architecture moderne il n’existe que l’académie. On peut rappeler comme autre exemple le jugement habituellement accrédité sur les résultats du grand concours du Palais des Nations à la fin des années 20.
De nombreuses et diverses expériences, tout en prenant les distances des présupposés et des résultats du Neues Bauen, peuvent être pleinement considérées modernes. Il suffit de penser au classicisme nordique, à l’Ecole de Stuttgart, à l’activité du premier Werkbund ou bien à certains apports très originaux qui mettent en discussion l’International Style dans toute l’Europe, bien avant la seconde guerre mondiale, en poussant à explorer des territoires qui ouvriront la voie aux divers « régionalismes » à nouveau d’actualité aujourd’hui. Très souvent la « marginalité » supposée de ces expériences est déterminée uniquement par la distance critique par rapport aux termes d’un débat qui se voulait « central » et seul porteur des vraies valeurs de la modernité.
En conclusion, il est important de souligner que tout cela n’est pas à prendre comme une opposition aux histoires et aux mythes établis, mais plutôt comme un complément. A propos de questions semblables, il y a douze ans, Manfredo Tafuri écrivait : « Il ne s’agit pas d’affranchir quelqu’un, mais de construire historiquement un rôle pour ceux qui ont voulu l’inactualité ».
Luca Ortelli. Extrait de FACES n° 32, été 1994, pp. 4-5
© Faces, 1994
- Traduit de l’italien par Carmelo Stendardo

Cinquante-deux aphorismes pour un avant-propos


1. L’aphorisme tranche, mais par sa substance autant que par sa forme, il décide en un jeu des mots. Même s’il parle de l’architecture, il ne lui appartient pas. Cela va de soi et l’aphorisme, qui relève du discours, donne souvent à l’évidence triviale l’autorité d’une sentence.
2. On attend de l’aphorisme qu’il prononce le vrai. Il prophétise, vaticine parfois, profère ce qui est ou ce qui sera, l’arrête d’avance dans une forme monumentale, certes, mais anarchitecturale : dissociée et a-systémique.
3. S’il y a une vérité de l’architecture, elle paraît doublement allergique à l’aphorisme : elle se produit comme telle, pour l’essentiel, hors du discours. Elle concerne une organisation articulée, mais une articulation muette.
4. Parler ici d’aphorismes, et par aphorisme, c’est s’installer dans l’analogie entre la rhétorique et l’architecture. On suppose ainsi résolu le problème, l’un des problèmes au-devant desquels se risquent, chacun à leur manière, tous les textes ici rassemblés. L’analogie entre logos (logie) et architecture n’est pas une analogie parmi d’autres. Pas plus qu’elle ne se réduit à une simple figure de rhétorique. Le problème de l’analogie définirait donc l’espace même de ce livre, l’ouverture donnée à son projet.
5. Un problème, le sujet d’une discussion ou le thème d’une recherche, dessine toujours, il esquisse les lignes d’une construction. C’est souvent une architecture protectrice. Problema : ce qu’on anticipe ou ce qu’on se propose, l’objet qu’on place devant soi, l’armure, le bouclier, l’obstacle, le vêtement, le rempart, la saillie, le promontoire, la barrière. On se tient toujours et devant et derrière le problème.
6. Qu’est-ce qu’un projet en général ? Et qu’est-ce que le « projet » en architecture ? Comment interpréter sa généalogie, son autorité, sa politique — bref sa philosophie à l’œuvre ? Si les textes réunis dans ce volume se croisent souvent autour de ces questions, on se demandera ce que peut signifier ce « projet »-ci, ce qui s’expose ou rassemble dans une pré-face, l’avant-propos ou l’avant-projet d’un livre sur l’architecture et la philosophie.
7. Un texte qui se présente comme un simulacre d’avant-propos, une série discontinue, un archipel d’aphorismes, voilà une composition intolérable en ce lieu, un monstre rhétorique et architectural. Démontrez-le. Puis lisez ce livre. Vous commencerez peut-être à douter.
8. Ceci est un mot, une phrase, donc ceci n’est pas de l’architecture. Mais prouvez-le, exhibez vos axiomes et vos définitions et vos postulats.
9. Voici de l’architecture : projet illisible et à venir, école encore inconnue, style à définir, espace inhabitable, invention de nouveaux paradigmes.
10. Paradeigma signifie « plan d’architecte », par exemple. Mais paradeigma, c’est aussi l’exemple. Il reste à savoir ce qui arrive quand on parle d’un paradigme architectural pour d’autres espaces, d’autres techniques, arts, écritures. Le paradigme comme paradigme pour tout paradigme. Du jeu de mots en architecture — et si le Witz y est possible.
11. L’architecture ne tolère pas l’aphorisme, paraît-il, depuis que l’architecture existe comme telle en Occident. Il faudrait peut-être en conclure qu’un aphorisme en toute rigueur n’existe pas : il ne paraît pas, ne se donne pas à voir dans l’espace, ni traverser, ni habiter. Il n’est pas, même s’il y en a. Comment se laisserait-il lire ? On n’y entre ni n’en sort jamais, il n’a donc ni commencement ni fin, ni fondement ni finalité, ni bas ni haut, ni dedans ni dehors. Ces assertions n’ont de sens qu’à la condition d’une analogie entre le discours et tous les arts dits de l’espace.
12. Ceci est un aphorisme, dit-il. Et l’on se contentera de le citer.
13. De la citation : bien qu’elle y soit engagée selon une modalité singulière, bien qu’elle n’imite pas à la façon dont une peinture ou une sculpture en viennent à représenter un modèle, l’architecture de la « tradition » appartient à l’espace de la mimesis. Elle est traditionnelle, elle constitue la tradition par là même. Malgré les apparences, la « présence » d’un édifice ne renvoie pas seulement à elle-même, elle répète, signifie, évoque, convoque, reproduit, elle cite aussi. Elle porte vers l’autre et se réfère, elle se divise en sa référence même. Des guillemets en architecture.
14. Il n’y a jamais eu d’architecture sans « préface ». Les guillemets signalent ici le risque de l’analogie. Une « préface » architecturale comprend, entre autres préliminaires, le projet ou ses analogues, la méthodologie qui définit les voies et les procédures, les préambules axiomatiques, principiels ou fondamentaux, l’exposition des finalités, puis les modèles de la mise en œuvre, et enfin, dans l’œuvre même, tous les modes d’accès, le seuil, la porte, l’espace vestibulaire. Mais la préface (sans guillemets cette fois, la préface d’un livre) doit annoncer l’« architecture » d’un ouvrage dont il est bien difficile de dire si, oui ou non, elle lui appartient.
15. On attend d’une préface qu’elle décrive et justifie la composition du livre : pourquoi et comment il fut ainsi construit. Pas de préface à une déconstruction, à moins que ce ne soit une préface à l’envers.
16. Toute préface est à l’envers. Elle se présente à l’endroit, comme il est requis, mais dans sa construction, elle procède à l’envers, elle est développée (processed), comme on le dit de la photographie et de ses négatifs, depuis la fin ou la finalité supposée : une certaine conception du « projet » architectural.
17. L’analogie a toujours procédé dans les deux sens, ce livre-ci le démontre : on parle de l’architecture d’un livre mais on a souvent comparé telles constructions de pierre à des volumes offerts au déchiffrement.
18. La préface n’est pas un phénomène institutionnel parmi d’autres. Elle se présente elle-même comme institution de part en part, l’institution par excellence.
19. Demander une préface, c’est se fier à une idée conjointe de la signature et de l’architecture : la loi du seuil, la loi sur le seuil ou plutôt la loi comme le seuil même, et la porte (une immense tradition, la porte « devant la loi », la porte à la place de la loi, la porte faisant la loi qu’elle est), le droit d’entrer, les présentations, les titres, la légitimation qui, dès l’ouverture de l’édifice, donne les noms, annonce, prévient, introduit, dégage une perspective sur l’ensemble, situe les fondations, rappelle l’ordre, rappelle à l’ordre du commencement et de la fin, du commandement aux finalités, de l’arkhè en vue du telos.
20. Une préface rassemble, relie, articule, prévoit les passages, dénie les discontinuités aphoristiques. Il y a un genre interdit pour la préface, c’est l’aphorisme.
21. Ceci n’est pas un aphorisme.
22. Le Collège international de philosophie se devait de donner lieu à une rencontre, une rencontre pensante, entre philosophie et architecture. Non pas pour les mettre enfin face à face, mais pour penser ce qui, depuis toujours, les maintient ensemble dans la plus essentielle des cohabitations. Elles s’impliquent l’une l’autre selon des nécessités qui ne relèvent pas seulement de la métaphore ou de la rhétorique en général (architectonique, système, fondement, projet, etc.).
23. Le Collège international de philosophie est la vraie préface, la vérité de la préface à cette rencontre et à ce livre. Sa préface à l’endroit puisque d’une certaine façon il n’existe pas encore, ce Collège, il se cherche depuis plus de quatre ans, il cherche la forme de sa communauté, son modèle politique, qui ne sera peut-être plus politique, et donc son dessein architectural qui ne sera peut-être plus une architecture. Mais pour ce faire, pour donner lieu à cette rencontre et à ce livre, il est soutenu par les forces d’une institution solide, légitime, ouverte, amie : le Centre de création industrielle (CCI). Ce fait est un problème, c’est-à-dire la plus généreuse des « protections » (voir plus haut, aphorisme 5) : centre, création, industrie.
24. Un aphorisme authentique ne doit jamais renvoyer à un autre. Il se suffit à lui-même, monde ou monade. Mais qu’on le veuille ou non, qu’on le voie ou non, des aphorismes s’enchaînent ici, comme aphorismes, et en nombre, numérotés. Leur série se plie à un ordre irréversible. En quoi elle est sans être architecturale. Lecteur, visiteur, au travail !
25. Un aphorisme n’enjoint jamais. Il ne s’exclame pas, il n’ordonne ni ne promet. Il propose au contraire, arrête et dit ce qui est, un point c’est tout. Un point qui n’est pas d’exclamation.
26. Le Collège international de philosophie s’est donné pour tâche de penser l’institutionnalité de l’institution, et d’abord la sienne, notamment en ce qui conjoint l’architecture, la signature et la préface (question des noms, des titres, du projet, de la légitimation, du droit d’accès, des hiérarchies, etc.). Mais, chose étrange, s’il a pu donner lieu à de telles rencontres et à un livre comme celui-ci, c’est peut-être dans la mesure où il n’a pas encore de lieu ni de forme architecturale qui lui soit propre. Cela tient sans doute à des limites héritées du vieil espace politico-institutionnel, à ses contraintes les plus tenaces et les moins contournables.
27. Dès son Avant-projet, le Collège international de philosophie se devait de penser son architecture, ou du moins son rapport à l’architecture. Il devait se préparer à inventer, et non seulement pour lui-même, une configuration des lieux qui ne reproduise pas la topique philosophique qu’il s’agit justement d’interroger ou de déconstruire. Cette topique réfléchit des modèles ou se réfléchit en eux : structures socio-académiques, hiérarchies politico-pédagogiques, formes de communauté qui président à l’organisation des lieux ou ne s’en laissent en tout cas jamais séparer.
28. Déconstruire l’artefact nommé « architecture », c’est peut-être commencer à le penser comme artefact, à repenser l’artefacture à partir de lui, et la technique, donc, en ce point où elle reste inhabitable.
29. Dire que l’architecture doit être soustraite aux fins qu’on lui assigne, et d’abord à la valeur d’habitation, ce n’est pas prescrire des constructions inhabitables, mais s’intéresser à la généalogie d’un contrat sans âge entre l’architecture et l’habitation. Est-il possible de faire œuvre sans aménager une manière d’habiter ? Tout passe ici par des « questions à Heidegger » sur ce qu’il croit pouvoir dire de cela, que nous traduisons en latin par « habiter ».
30. L’architecture d’une institution – par exemple une institution philosophique – n’est ni son essence ni son attribut, ni sa propriété ni son accident, ni sa substance ni son phénomène, ni son dedans ni son dehors. Ce qui s’ensuit, qui n’est pas rien, ne relève peut-être plus de la conséquence philosophique : l’architecture ne serait pas.
31. En se construisant – dé-construisant – ainsi, le Collège international de philosophie se devait, cela dès son avant-projet, d’ouvrir la philosophie à d’autres « disciplines » (ou plutôt à d’autres questions sur la possibilité de la « discipline », sur l’espace de l’enseignement), à d’autres expériences théoriques et pratiques. Non seulement au nom de la sacrosainte interdisciplinarité qui suppose des compétences attestées et des objets déjà légitimes, mais en vue de « jets » (projets, objets, sujets) nouveaux, de gestes nouveaux, encore inqualifiés. Qu’est-ce que « jeter » pour la pensée ? Et pour l’architecture ? Que veut dire « jeter les fondements » ? Qu’est-ce que « lancer », « envoyer », « s’élancer », « ériger », « instituer » ?
32. La déconstruction du « projet » dans tous ses états. L’architecture est sans être dans le projet — au sens technique ou non de ce terme.
33. On doit poser à l’architecte une question analogue à celle du subjectile (par exemple en peinture, dans les arts graphiques ou sculpturaux). Question du support ou de la substance, du sujet, de ce qui est jeté dessous. Mais aussi de ce qui se jette en avant ou d’avance dans le projet (projection, programme, prescription, promesse, proposition), de tout ce qui appartient, dans le processus architectural, au mouvement du lancer ou de l’être-lancé, du jeter ou de l’être-jeté (jacere, jacio/jaceo). Horizontalement ou verticalement : des fondations pour l’érection d’un édifice qui toujours s’élance vers le ciel, là où, suspens apparent de la mimesis, il n’y avait rien. Une thèse pose quelque chose à la place de rien ou du manque. C’est le projet comme prothèse. Autre valeur du pro : non pas en avant ou en avance, ni le problème ni la protection, mais ce qui vient à la place de —. De la supplémentarité architecturale.
34. Le Collège international de philosophie se devait — et cela fut dit dès l’avant-projet — de donner lieu à des recherches appelées par commodité performatives. Entendons par là ces moments où le savoir fait œuvre, quand le constat théorique ne se laisse plus dissocier de l’événement qu’on appelle « création », « composition », « construction ». Il ne suffit pas ici de dire que l’architecture en est un des meilleurs paradigmes. Le mot même et le concept de paradigme ont une valeur exemplairement architecturale.
35. Le Collège international de philosophie annonçait, dès son avant-projet, qu’il ne négligerait aucun des enjeux de ce qu’on appelle l’enseignement, et sans se limiter à la discipline philosophique. Toute didactique comporte une philosophie, un rapport à la philosophie, fût-il dénié. Quelle est, dans ce pays, la philosophie pratiquée ou ignorée par la pédagogie de l’architecture, l’enseignement de son histoire, de ses techniques, de sa théorie, de ses rapports avec les autres « arts », les autres textes, les autres institutions, les autres instances politico-économiques ? Dans ce pays et dans les autres ? La situation de la France est très singulière à cet égard et ce livre, en s’attachant à certaines prémisses philosophiques, pourrait contribuer à une sorte de déplacement général des frontières, à une autre expérience de l’internationalité. C’est sans doute une urgence pour l’architecture, en tout cas un projet essentiel pour un Collège international.
36. Compte tenu de ce qui se trouve enseigné du « projet » architectural dans ce livre, on hésite à parler d’un « projet » du Collège international de philosophie. Dire qu’il n’a pas de projet, ce n’est pas pour autant dénoncer son empirisme ou son aventurisme. De même, une architecture sans projet s’engage peut-être dans une œuvre plus pensante, plus inventive, plus propice que jamais à la venue de l’événement.
37. Dire de l’architecture qu’elle n’est pas, c’est peut-être sous-entendre qu’elle arrive. Elle se donne lieu sans en revenir, voilà l’événement.
38. Il n’y a pas de projet déconstructeur, pas de projet pour la déconstruction.
39. Le projet : c’est et ce n’est pas l’essence de l’architecture. II aura peut-être été l’histoire de l’architecture, son ordre en tout cas.
40. Laisser l’aphorisme sur le seuil. Il n’y a pas de place habitable pour l’aphorisme. La force disjonctive ne peut se mettre en œuvre architecturale qu’à l’instant où, par quelque synergie secrète ou déniée, elle se laisse intégrer à l’ordre d’un récit, quelle qu’en soit la dimension, dans une histoire ininterrompue, entre le commencement et la fin, le soubassement fondateur et le faîte, la cave et le toit, le sol et la pointe de la pyramide...
41. Pas d’habitat pour l’aphorisme, mais on n’habite pas davantage un aphorisme, ni l’homme ni le dieu. L’aphorisme n’est ni une maison, ni un temple, ni une école, ni un parlement, ni une agora, ni une tombe. Ni une pyramide ni surtout un stade. Quoi d’autre ?
42. Bon gré mal gré, l’aphorisme est irrémédiablement édifiant.
43. Rien de plus architectural qu’un aphorisme pur, dit l’autre. Architecture dans la forme la plus philosophique de son concept : non pas une interruption pure, non pas un fragment dissocié, mais une totalité qui prétend se suffire, la figure du système (l’architectonique est l’art des systèmes, dit Kant) dans son éloquence la plus autoritaire, péremptoire, dogmatique, auto-légitimante jusqu’à la complaisance, quand elle met tout en œuvre pour faire l’économie d’une démonstration.
44. L’aphorisme résume, rassemble tout en lui-même, comme le savoir absolu. Il ne pose plus de question. Point d’interrogation : impossible de ponctuer ainsi un discours qui est ou qui produit sa propre méthode, comprend en lui-même ses préambules ou vestibules. Si l’architecture est dominée par le logos, le caractère à la fois prescriptif et entier de l’aphorisme voit triompher cette philosophie logocentrique de l’architecture. L’aphorisme commande, il commence et finit : architectonique, archi-eschatologie et archi-téléologie. Il rassemble en lui-même, agence l’avant-projet, le projet, la maîtrise d’œuvre et la mise en œuvre. Il nie la résistance des matériaux (ici tous les mots en R : la terre, la matière, la pierre, le verre, le fer, sans lesquels, pense-t-on, il n’y a pas d’architecture qui tienne, seulement des discours analogiques sur l’architecture). Pour le vérifier, il ne faut pas se contenter de ce que Hegel dit de l’architecture elle-même, mais tenir compte de ce qu’elle n’est rien, elle-même, une fois soustraite à la téléologie du savoir absolu. De même, les aphorismes ne peuvent se multiplier, se mettre en série, qu’à se confirmer ou à se contredire les uns les autres.
45. Il y a toujours plus d’un aphorisme.
46. Malgré leur apparence fragmentaire, ils font signe vers la mémoire d’une totalité, à la fois ruine et monument.
47. Dans leur multiplicité contradictoire, ils peuvent toujours redevenir des moments dialectiques, le savoir absolu en réserve dans une thèse ou dans une antithèse. Préface à un court traité de la négativité en architecture. Comment une interruption architecturale reprend un sens, une fonction, une finalité (travail du négatif) dans une nouvelle édification.
48. Contrairement à l’apparence, « déconstruction » n’est pas une métaphore architecturale. Le mot devrait, il devra nommer une pensée de l’architecture, une pensée à l’œuvre. D’abord ce n’est pas une métaphore. On ne se fie plus ici au concept de métaphore. Ensuite une déconstruction devrait déconstruire d’abord, comme son nom l’indique, la construction même, le motif structural ou constructiviste, ses schèmes, ses intuitions et ses concepts, sa rhétorique. Mais déconstruire aussi la construction strictement architecturale, la construction philosophique du concept d’architecture, celui dont le modèle régit aussi bien l’idée du système en philosophie que la théorie, la pratique et l’enseignement de l’architecture.
49. On ne déconstruit pas des superstructures pour atteindre enfin le fond, le sol originaire, l’ultime fondement d’une architecture ou d’une pensée de l’architecture. On ne fait pas retour à une pureté ou à une propriété, à l’essence de l’architecture elle-même. On s’en prend au schème du fondamental et aux oppositions qu’il induit : « fond/surface », « substance/qualité », « essence/accident », « dedans/dehors », et surtout « recherche fondamentale/recherche finalisée », cette dernière opposition étant ici de grande conséquence.
50. L’engagement, la gageure : tenir compte de cette nécessité architecturale ou anarchitecturale sans détruire, sans en tirer des conséquences seulement négatives. Le sans-fond d’une architecture « déconstructrice » et affirmative peut donner le vertige, mais ce n’est pas le vide, ce n’est pas le reste béant et chaotique, le hiatus de la destruction. Inversement, ce n’est plus la Destruktion heideggerienne même si on doit en supposer le projet. Encore moins l’invraisemblable désobstruction dont on l’a récemment affublée dans notre langue.
51. Ni Babel, ni Nemrod, ni le Déluge. Entre khora et arche, peut-être, s’il y avait une architecture qui ne fût, en cet entre, ni grecque ni juive. Une filiation encore innombrable, une autre série d’aphorismes.
52. Maintenir, malgré les tentations, malgré toutes les réappropriarions possibles, la chance de l’aphorisme, c’est garder dans l’interruption, sans interruption, la promesse de donner lieu, s’il le faut. Mais ce n’est jamais donné.
Jacques Derrida, source : Derrida en castellano